Quotidien de la Côte version électronique : Lohri l’indomptable fait sa place à Lausanne

Par Antoine Guenot

PORTRAIT Il y a une année, le syndic de Bassins avait créé la surprise en accédant au Parlement vaudois. Cet insoumis, peu adepte des carcans politiques, s’est-il adapté à son nouveau rôle de député?

C’était il y a un peu moins d’une année. A la surprise générale, Didier Lohri, bouillonnant syndic de Bassins, obtenait le deuxième siège des Verts du District de Nyon au Grand Conseil. Surprise, tout d’abord, parce que selon les pronostics cette place avait de bonnes chances de revenir à la syndique de Commugny, Odile Decré. Mais, à onze voix près, voilà qu’elle lui passait sous le nez, raflée par son colistier des hauts nyonnais.

Surprise, ensuite, parce que Didier Lohri ne semblait, jusque-là, pas du genre à rejoindre les rangs d’un groupe politique. Ni, d’ailleurs, ceux d’une institution aussi stricte que le Parlement vaudois. Insoumis, libre penseur, il l’a dit lui-même à plusieurs reprises: les carcans très peu pour lui, au risque de sortir de ses gonds.

Un député «pointu»

Et pourtant. Le trublion semble bien s’être pris au jeu, au point de se profiler comme l’un des députés les plus actifs. Interpellations, motions, postulats, questions orales, l’homme fait feu de tout bois, visiblement loin des préoccupations électoralistes. Car, lorsqu’il s’exprime, c’est souvent pour aborder des sujets techniques, touchant à la facture sociale ou à l’aménagement du territoire. Des problématiques généralement opaques pour le citoyen lambda.

«C’est tout à son honneur, commente Pierre Wahlen, président des Verts de La Côte, qui se dit satisfait de sa nouvelle recrue: «Il s’est bien intégré. Il est très présent et fait beaucoup d’interventions. Il défend bien les valeurs qui nous rassemblent.»

« Il a une forte présence. Je pense que tous les membres du Grand Conseil l’ont déjà remarqué. »

Vert, vraiment?

Langue de bois ou réalité? Ce qui est sûr, c’est que Didier Lohri ne passe pas inaperçu au sein du Parlement vaudois. Parole de députés de gauche comme de droite. «Il a une forte présence. Je pense que tous les membres du Grand Conseil l’ont déjà remarqué», confie Valérie Induni, chef du groupe socialiste au Grand Conseil et municipale à Cossonay.

Le chef du groupe UDC et municipal d’Echichens Philippe Jobin confirme: «Il pose beaucoup de questions et c’est une bonne chose. Même si parfois certaines ont déjà été discutées en commissions. Mais c’est normal, il vient d’arriver. Il ne peut pas connaître tout l’historique des séances.»

Valérie Induni nuance toutefois quelque peu l’appréciation du parti écologiste au sujet de son «poulain»: «Je ne le connais pas encore très bien mais on sent que le formatage, il ne doit pas aimer ça. D’ailleurs, sa coloration ‘‘Verte’’ n’est pour le moment pas très évidente. Ses actions touchent surtout aux finances communales et aux rapports entre communes et Canton.»

Le chef de groupe des Verts, l’Yverdonnois Vassilis Venizelos, ne l’entend pas de cette oreille. «Penser que nos membres ne doivent aborder que des questions environnementales est réducteur, s’exclame-t-il. Nous défendons un projet de société qui touche l’ensemble des problématiques, comme la fiscalité et l’aménagement du territoire. Sur ces dossiers, c’est une force d’avoir Didier Lohri à nos côtés.» Et le responsable d’ajouter qu’aucun coup de gueule n’est à signaler: «C’est tout à fait agréable de travailler avec lui.»

« Je crois qu’il y a beaucoup de légendes qui courent à mon sujet. »

Nouvelles affinités

A presque 60 ans, le syndic de Bassins aurait-il mis de l’eau dans son vin? «Non, répond tout de go l’intéressé. Je suis toujours la même ligne. Et si j’ai accepté de rejoindre les Verts, c’est parce qu’il s’agit d’un mouvement et non d’un parti.» Reste que le politicien admet s’être piqué au jeu de l’arène parlementaire. Bien sûr, parfois, la lenteur des débats l’agace. Trop de bla-bla. L’homme de terrain aimerait que certains députés en viennent plus vite au fait. Mais il s’y attendait.

Et ce qui lui plaît? «Au Grand Conseil, on a le droit d’avoir un avis différent. Ce qui n’est pas toujours le cas dans le district de Nyon, où l’on peut alors vite être perçu comme un emmerdeur.» C’est qu’à Lausanne, Didier Lohri s’est trouvé de nouveaux alliés. «Je me découvre des affinités avec d’autres élus du Pied du Jura et de l’arrière-pays, plus qu’avec ceux de mon district. Du coup, j’ai l’impression d’avoir plus de soutien pour faire passer mes idées.» Et celles de son groupe politique. Car il assure que les prochains sujets sur lesquels il s’exprimera seront plus axés «Verts».

Didier Lohri, pas si indomptable que ça? «Je crois qu’il y a beaucoup de légendes qui courent à mon sujet. Moi, tout ce que je souhaite, c’est laisser une trace en défendant les gens du Pied du Jura.»